Champions du monde. Franchement, ça fait bizarre. Je n’ai pas 70 piges, donc je peux difficilement justifier l’impatience de l’attente par le nombre élevé de phases finales auxquelles j’ai assisté ou, plus tragiquement, par la proximité d’une mort soudaine et inéluctable. Et pourtant, j’ai bien cru que ce moment n’arriverait jamais. Toutes les Coupes du Monde de ces vingt dernières années m’ont, à chaque fois, laissé sur ma faim. Comme si le destin nous faisait toujours du pied, mais finissait par nous claquer la porte au nez. Comme cette belle fille qui, à l’autre bout du bar, vous fait un clin-d’oeil, laissant présager une fin de soirée inoubliable et légendaire, alors que vous savez pertinemment qu’elle partira aux bras d’un autre Jules, bien plus gâté physiquement par la nature, mais tellement plus bête que vous (évidemment). En un bref instant, alors que la victoire nous tendait ses « tentacules » (toute allusion à un certain octopode n’est pas fortuite), des images faisant partie de l’imaginaire espagnol me traversaient l’esprit : Luis Enrique tout en pleurs et en sang, Zubizarreta qui nous fait une « zubizarrete », Al-Gandhour qui tient à ses vacances sponsorisées par la République de Corée… et c’est le coup de sifflet final… et c’est la liesse… c’est vraiment fini… et sans (trop) de coups bas… oui, ça fait vraiment bizarre.
L’Espagne devient ainsi la huitième nation à remporter une Coupe du Monde. Après l’Allemagne de Gerd Müller, la France de Zinédine Zidane et le Brésil de Ronaldo, la Roja devient aussi la quatrième équipe à remporter un titre mondial et continental d’affilée. C’est la conclusion parfaite pour une génération de joueurs considérée comme la plus belle, la plus technique et la plus déterminante de l’histoire du football espagnol.
Il est intéressant de souligner que cette Coupe du Monde a été remportée face aux Pays-Bas, face à une nation qui aura eu une influence incontestable (et incontestée dans la Péninsule) sur le style de jeu du collectif ibérique. Cette victoire, d’une certaine façon, est également batave. Nous pourrions remonter à la source et remercier le grand Rinus Michels, dont Johann Cruyff fut le disciple et l’un des coupables de l’exportation du football total en Espagne. Son influence a marqué les esprits et certains centres de formation, comme la très louée Masía du Barça. Les Xavi, Iniesta et Fàbregas, ou dit autrement, le tiqui-taca, ne sont, au final, que la résultante de cette inspiration hollandaise. Bien sûr, même si la filiation existe, les styles diffèrent sur bien des points. J’ajouterais que la Roja’10 n’est pas non plus la copie-conforme de la version 2008. Ce que la Championne du Monde a gagné en rigueur défensive, elle l’a perdu en folie offensive. La faute également à ce manque de fraîcheur qui caractérise les joueurs disputant la plupart des grandes compétitions et qui finissent chaque saison littéralement sur les rotules.
Oui, nous pouvons remercier le football oranje de son apport, même si son équipe nationale actuelle ne lui fait pas honneur. Hormis deux ou trois exceptions notables, la formation batave se sera illustrée durant cette finale pour son « autre foot ». Il est un peu inquiétant, frustrant et décevant de constater que la défense, dans le football, n’est devenue qu’une simple question de muscle et d’intimidation (et c’est un ancien latéral gauche qui vous le dit). Où sont donc passés ces grands défenseurs capables de s’imposer sur les pelouses par leurs placements et leur vista plutôt que par la taille de leurs crampons ? Le football moderne est certes devenu très athlétique, mais pas vraiment dans le bon sens du terme. La faute avant tout à celui qui est payé pour éviter les débordements et les erreurs de jeu. Mais de ce côté, rien de nouveau avec Howard Webb. L’Anglais nous avait déjà démontré précédemment qu’il était bien trop lâche pour prendre en main une rencontre de ce niveau.
Mais je ne veux pas finir sur une mauvaise note. A la fin de la saison, viendra le moment des récompenses individuelles et j’ai hâte de voir de quelle façon aura été perçue la prestation de ces joueurs au maillot rouge, ambassadeurs d’un football un peu différent, où le ballon est bichonné, cajolé et choyé avant d’être passé à son coéquipier. Pour le nouveau Ballon d’Or FIFA, Iniesta ? Xavi ? Villa ? Casillas ? Ou tout de même Sneijder, auteur d’une superbe saison ?
Champions du Monde. Enfin.
trackback uri
10 commentaires
Tu illustres parfaitement ce que Cruyff a dit : http://coupe-du-monde.tf1.fr/actu-coupe-du-monde/cruyff-degoute-par-les-pays-bas-5924204.html
Quant à moi, pour soutenir l’Espagne, j’ai parié sur une victoire finale d’eux et un match nul 0 à 0 à l’issue du temps réglementaire
Grâce à eux et à ce pari combiné, j’ai pu arrondir un peu cette fin de mois !!!
Un grand bravo à l’Espagne !
Excellent billet. Tout y est, avec un peu d’émotion
. La grande déception de 82, les espoirs déçus de 86, Zubi et la Corée…balayée ! L’Espagne est un beau champion, et qui joue bordel ! Bravo à eux, mais on vous tape la prochaine fois !!
Et la FIFA – en est-elle seulement capable ? – doit (plus que la video) faire évoluer les règles !
- but validé sur action « Suarez »
- 1 faute = 1 jaune. 3 jaunes = 1 rouge. Le tout géré par l’arbitre délégué pour ne pas hacher le jeu. Cela permettra à l’arbitre de cesser les calculs liés au deuxième jaune.
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Oui, il peut sans aucun doute bomber le torse et « réclamer » sa part du butin. Il le mérite !
Je suis conscient que je critique très souvent l’arbitrage, que ce soit durant cette CM ou lorsque je débats sur la Liga. Très franchement, je n’aime pas ça. On le sait tous, les meilleurs arbitres savent se faire oublier. C’est pourtant de moins en moins le cas. Et je n’ai pas l’impression que cette tendance puisse s’inverser dans l’immédiat.
Je n’aime pas écrire sur les mauvaises prestations des arbitres, mais je me dis en même temps que lorsqu’il y a une injustice, ne pas en parler ou l’ignorer ne va pas la faire disparaître. Si j’ai tort, n’hésitez pas à me le faire savoir.
Joli Tristelune
Ou, pourais-je dire, Felizlune ou Heureuxlune…..ça changerait un peu !
Belle championne cette Roja, bien que je préfère le jeu allemand.
L’arbitrage de cette finale me laisse encore sur le derrière, pour être polie.
Il n’y avait aucun arbitre avec la video sur le banc ? Remeber Zidane. Lui, il a laissé quelques cheveux sur le torse de Mater***** et De Jong y a laissé un ou deux crampons. Cherchez l’erreur…
Y a-t-il eu des consignes ?
Enfin bref, les joueurs bataves ne sortent pas grandis de l’affaire on plus. Mais sur le moment, ils ont raison de râler sur la faute de Puyol non sifflée sur Robben et le corner non accordé juste avant le but. Tout comme VB et DJ qui ne récoltent pas de rouge. Iniesta ne devait pas se venger sur VB, même si celui-ci est une enflure de première.
Des deux côté il y a eu des décisions bizarres de Mr Webb.
Même Lannoy aurait été meilleur
J’ai rarement vu une finale si hachée et violente mais c’était intense ça c’est sûr.
Bref, les espagnols, faut profiter de ces moments, c’est agréable à vivre et ça ne dure pas.
Rien à dire, excellent article!!
En d’autres mots :
Roja 2008 = Barca 2008/09 (Triplé) – En somme le beau jeu par excellence.
Rpja 2010 = Barca 2009/10 (Liga) – Le réalisme, et un apport Attaque/Défense plus équilibré.
Félicitations encore une fois
Si Robben tombe, Webb siffle…peut-être
J’ai la faiblesse de penser que Webb n’approuvait pas le jeu hollandais, et qu’en conséquence il ne sifflait pas sur ce genre d’action !
kijux > merci
Moriarty > Un ami m’a fait la même réflexion. A savoir que Webb n’a peut-être pas sifflé, parce que Robben ne s’est pas laissé tomber. Pour une fois qu’un joueur n’en fait pas des tonnes… dommage.
C’est que j’avais dit sur mon com en live !
Pour une fois que Robben ne tombe pas alors qu’il aurait dû