Makhachkala, un nom que tous les journalistes de Canal se sont ridiculisés à vouloir prononcer ce week-end. Makhachkala, une ville de 460 000 habitants en bord de la mer Caspienne. Makhachkala, capitale du Daghestan, une république du nord-Caucase à la sécurité précaire. Makhachkala, où tous les regards sont tournés depuis l’arrivée de Samuel Eto’o pour un total (transfert et salaire) de 100 millions d’euros. Un club sorti de nulle part et qui veut tout simplement devenir le plus grand.
Le club a beau avoir été créé en 1991, sa vie commence en janvier 2011, lorsque Suleyman Kerimov le rachète. Jusque là, l’Anzhi a oscillé entre première et deuxième division, et sort d’une saison terminée à la 11e place de l’élite, avec neuf petites victoires seulement. A peine un mois après l’arrivée de son nouvel homme fort, l’Anzhi fait déjà parler avec l’arrivée de Roberto Carlos pour cinq millions d’euros par an. A son arrivée, le Brésilien déclare: « Je donnerai mon maximum pour faire progresser le club et le rendre plus professionnel. Avec les moyens et l’ambition de notre nouveau président Kerimov, tout est possible. L’Anzhi est en train de devenir un club qui compte en Russie, nous voulons attirer les fans au stade, et atteindre le niveau européen d’ici quelques années. »
Avec Kerimov, tout est possible. Mais qui est ce Kerimov? Ancien député à la Douma aujourd’hui sénateur, 118e fortune mondiale selon Forbes en 2011, Kerimov est à la tête d’une fortune chaque jour plus proche de celle de Steve Jobs. Une fortune estimée à près de huit milliards d’euros qu’il doit à sa société pétrolière Nafta-Moskva, à des parts dans Gazprom et à diverses sociétés exploitant les métaux précieux (or et minéraux). Kerimov, un pur produit du Daghestan – il est né à Derbent, la deuxième ville de la région – dont la vie a radicalement changé en 2006.
Alors qu’il est au volant de sa Ferrari Enzo sur la Promenade des Anglais, à Nice, Kerimov est victime d’un violent accident. Sous le choc, la Ferrari est coupée en deux. Gravement blessé, Kerimov mettra de longs mois à se remettre sur pieds.
Depuis, Kerimov est vu comme un vrai philantrope au Daghestan, grâce aux importants dons qu’il fait à divers hôpitaux et associations caritatives. L’Anzhi est son dernier caprice. Une envie facilitée par son ami Magomedsalam Magomedov, président de la république nord-caucasienne qui lui offre le club avec la condition d’investir 200 millions d’euros dans ses infrastructures.
Kerimov ne se fait pas prier. Son ambition est d’ériger pour cette somme un stade de 40 000 places capables d’accueillir dans les meilleures conditions les plus grandes équipes européennes en Ligue des Champions, qu’il espère disputer dès 2012. Un investissement qui est également vu comme une entreprise de philantropie.
Aujourd’hui, toute l’équipe de Makhachkala vit à Moscou et ne vient au Daghestan que pour les matchs à domicile. Car si la république est bien plus développée que sa voisine tchétchène, sa situation économique est encore loin en retrait par rapport au reste du pays et elle reste une zone sous danger permanent. Le Daghestan est en effet partagé par une guerre entre islamistes et pro-russes. Pas moins de 59 policiers y ont été tués depuis le début de l’année. L’ordre relatif rétabli par Ramzan Kadyrov en Tchétchénie à même semblé pousser certains mouvements séparatistes à se déplacer vers le Daghestan, comme l’attentat de l’aéroport de Moscou en janvier dernier – et attribué à des séparatistes islamistes du Daghestan – l’a montré. L’idée de Kerimov est de tenter de pacifier sa région d’origine grâce aux investissements consentis dans le club. Selon lui, ceux-ci pourraient contribuer à l’amélioration des relations entre les leaders politiques locaux et le Kremlin, où est décidé le sort de la région, et donc aider à résoudre, du moins partiellement, les conflits. Il est prêt pour celà à investir un milliard d’euros.
Kerimov veut construire un club capable de concurrencer les meilleurs en Ligue des Champions. Roberto Carlos est la première pierre de son édifice. Il est rapidement rejoint par ses compatriotes Joao Carlos, arrivé de Genk, Diego Tardelli et Jucilei, néo-international acheté 10 millions d’euros aux Corinthians. Mais les arrivées les plus médiatiques n’arrivent qu’après: Mbark Boussoufa arrive d’Anderlecht. Puis c’est au tour de la perle hongroise Balazs Dzsudzsak de venir du PSV pour 15 millions d’euros. Il est rapidement suivi par Yuri Zhirkov, qui quitte Chelsea pour la même somme. Avant enfin l’arrivée de Samuel Eto’o. Du beau monde pour entourer l’ancien lillois Benoît Angbwa, au club depuis le début de l’année.
Après le Zenit St-Pétersbourg, ressuscité par une grande génération (Arshavin, Pogrebnyak, Kerzhakov) ainsi que la volonté de Gazprom et du président Poutine de contester le monopole des clubs moscovites. Après le Rubin Kazan, double champion de Russie grâce au soutien des pouvoirs locaux du Tatarstan, riche en hydrocarbures. Après le Terek Grozniy, soutenu par Kadyrov, désireux de monter une grande équipe en Tchétchénie avec le soutien du Kremlin pour tenter de pacifier la région. C’est aujourd’hui au tour de Suleyman Kerimov de faire de son club un nouveau centre d’intérêt économique et médiatique. Un désir qui permet au football russe de se développer encore plus plus et plus vite, grâce à des capitaux injectés au moment où les clubs occidentaux subissent de plein fouet l’impact de la crise.
Kerimov est ambitieux et a des moyens. après Eto’o, ses nouvelles cibles se nomment Wilkshire, Neymar, Gattuso, Ganso, Hulk, Zarate, Raul, Vidic ou encore Arshavin. Fort de sa fortune et du développement du football russe, qui va rapidement se doter de stades ultra-modernes dans l’optique de la Coupe du Monde 2018, Kerimov ne doute pas. L’Anzhi Makhachkala peut rivaliser avec les plus grands sur le marché des transferts. En attendant de rivaliser sur les terrains.
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13 commentaires
Sympa comme article. Le problème majeur en russie reste le racisme et la violence de quelques supporters Ultras… Bien sûr, la barrière de la langue est aussi un handicap pour tout joueur étranger.
Concernant Eto’o, j’ai vu récemment une interview où il prétend venir à Anzhi juste pour le challenge sportif… Sans déconner, il prend des gens pour des imbéciles ?
NB: Pj, des rumeurs circulent aussi sur une offre d’Anzhi marrakechkalala (:)) concernant Alvés.
Très beau topo instructif, merci. Un club a observer, qui engage une belle aventure, surprenante, qui retient l’attention, il y a là-bas un vrai défi en route c’est indéniable.
@Kijux: Vu l’objectif d’être en LdC dès la saison prochaine et l’arrivée subite de gros capitaux, l’Anzhi fait des offres tous azimuts, et beaucoup spéculent autour de ce nouveau riche. Pas étonnant qu’on entende parler d’offres sur à peu près tout le monde. Pour Alves, ce ne serait pas étonnant vu qu’il est certainement le central le plus côté du championnat russe.
Pour cette saison, l’Anzhi devrait se contenter de l’Europa League.
Le classement à la 22e journée sur 30: Zenit (46 pts), CSKA Moscou (46), Dinamo Moscou (41), Rubin Kazan (38) et Anzhi (37) devant le Lokomotiv et le Spartak (36).
Avec la montée en puissance de ces nouvelles équipes – Dinamo (où joue Kuranyi), Kazan, Anzhi et même le promu Kuban Krasnodar (8e avec 34 points), le championnat se resserre énormément et est nettement plus difficile pour les grosses écurie moscovites. Le niveau est vraiment en hausse dans cette compétition.
@Bolkano: Merci!
J’ai lu, je n’sais plus où, qu’Alves avait refusé l’offre.
Perso je suis assez fan de ce football russe, bien que je ne le suive que lors des matchs de la ligue des champions. Il manque encore de couverture médiatique au niveau européen et c’est dommage, parce que les footballeurs russe ne sont pas manchots (sic) depuis bien des générations. Cependant j’éprouve un certain malaise avec ces clubs aux énormes moyens dérrière lesquels il y a une volonté politique à peine dissimulée.
Remarque, c’était déjà un peu le cas du temps de l’ex-union sovietique avec les clubs de l’armée, du KGB… Etc… Etc…
Pour ce qui est de l’Anzhi, la situation au Daghestan est quand même chaude bouillante et l’aspect sécurité bien compliqué. C’est un drôle de pari. Triste aussi le fait que les joueurs ne puissent pas s’entrainer ni vivre sur place. Pas sûr donc, que l’ensemble de la population locale considère l’Anzhi comme le club de leurs coeurs.
Mais pour le reste, si des clubs comme Manchester city, le PSG, Chelsea ou Malaga benéficient de l’apport de gros capitaux, ça me va très bien que d’autres nations profitent de la venue de gros investisseurs. Il n’y a pas que l’europe de l’ouest dans le football.
Sinon j’suis d’accord avec Kijux, le côté raciste et violent des supporters russes dont on entend parler… Détestable.
PS : Bordel ! Elle a bien morflé, la Ferrari de Kerimov !
Il ne devait pas respecté la limitation de vitesse en ville.
C’est connu en psycho. Ça s’appelle le syndrome Nanguien.
Bel article PJ.
Eto’o n’y va pas non plus en ayant toute la responsabilité des résultats.
Il y a vraiment du beau monde autour de lui et le championnat Russe risque d’être encore meilleur.
Le problème restera qu’au bout de 2 ans en Russie, tu n’as qu’une envie: te barrer au chaud !!
Makhachkala celle là , elle est malade ?
Nokomment de retour !! … à la Makhachkalachnikov
ca vaut neuchatel xamax.
Le club de football du Neuchâtel Xamax était au bord du chaos en mai dernier. Les résultats sportifs de l’équipe suisse se dégradaient toujours plus alors que la santé financière du club inquiétait. La ville, les fans, tout le monde souhaitait le départ du propriétaire, Sylvio Bernasconi, et semblait prêt à accepter n’importe qui pour le remplacer.
Et ils ont eu n’importe qui. Sous les traits d’un obscur homme d’affaires tchétchène, Bulat Chagaev, le club de Neuchâtel a remplacé le choléra par la peste noire. Car si l’ancien propriétaire a creusé les finances du club, le nouveau fait régner la terreur.
Après avoir multiplié les coups d’éclat (signature de Sonny Anderson en tant qu’entraîneur puis licenciement 15 jours plus tard) et les déclarations paranoïaques dans la presse, Bulat Chagaev enrage devant les résultats de son équipe. Six matchs ont déjà été joués et Neuchâtel est avant-dernier du championnat, avec une petite victoire.
Ce week-end, face à Lausanne, seul club moins bien classé, l’ombrageux Chagaev espère donc un succès. Sauf que son équipe, tétanisée, se montrera incapable d’obtenir mieux qu’un match nul. Après le match, il descend donc dans les vestiaires, entouré de ses gardes armés, et menace ses joueurs et son entraîneur.
Bordel, ça va valoir un article ça.
Y’a un article sur coupfranc.fr pour les intéressés…
coupfranc.fr
C’est là, ça se passe dans MA ville… sous mes fenêtres dans mon club de coeur…. mais justement j’ai pas encore trouvé la « force » d’en faire un article
Ou encore là sur Panenka.fr