€40 millions, voila sans doute le chiffre à retenir du mercato belge. Le montant dépensé deux fois cet été pour attirer deux pépites noirs-jaunes-rouges. Le départ d’Eden Hazard vers les sommets du football européen était attendu de longue date. Le Brainois avait annoncé ses envies d’ailleurs et tout le monde, de Zinedine Zidane à Sir Alex Ferguson, le draguait. Le transfert d’Axel Witsel était lui moins attendu. Il y a un an, lorsque le milieu de terrain quittait le Standard de Liège pour le Benfica Lisbonne, de nombreux observateurs doutaient qu’il s’agisse là d’un véritable pas en avant. Certains s’imaginaient que Benfica et Standard jouaient dans la même division. Aujourd’hui, force est de constater qu’Axel avait vu juste. Bravo à lui, car savoir diriger sa carrière, c’est aussi l’apanage des grands joueurs. En un an il est devenu un incontournable de nos Red Devils et l’un des tout meilleurs (et plus chers) médians d’ Europe. Alors que les médias nous annonçaient Witsel plutôt en Espagne ou in the UK, c’est finalement le Zenit Saint-Pétersbourg qui a chopé la floche.
A Question idiote…
Une fois de plus, un club russe attire un talent à force de roubles. Un gros sac de rouble pour le coup. Et une fois de plus, la meute des journalistes assaillent l’heureux émigré de la même curieuse question : « C’est pour l’argent ? ». J’ai beau cherché dans ma mémoire, je ne me souviens pas d’un joueur ayant répondu par l’affirmative à cette question. A question idiote, réponse idiote. Nous avons donc le plus souvent droit à une belle langue de bois. Certains ont beaucoup apprécié le projet du club, d’autres ont senti dans les discours de l’entraîneur et du président qu’ils étaient vraiment désirés.
Bien sûr certains sont plus honnêtes que d’autres et concèdent que l’argent a joué un rôle, en tempérant tout de même par un très à la mode : « Si je jouais pour l’argent, j’aurais signé plutôt à Outsiplou-les-bains-de-pieds…« . Le pognon, oui mais pas trop.
Cette foutue question est lourde de sens. Comme si les journalistes étaient jaloux du type vers qui ils tendaient leur question. Ces micros tendus sont comme des lances, des piques, prêts à transpercer le gars nouvellement plein aux as. « Votre transfert, c’est le choix de l’argent?« , l’air de dire: » Tu serais pas un abominable cupide, connard?«  Mais finalement, qu’est ce qu’on leur reproche à ces joueurs de foot? Qu’est ce qui dérange tant? Les footeux sont-ils foncièrement mauvais car ils signent des contrats à 6 zéros? A-t-on jamais vu un illuminé refuser de gagner au lotto?
Le salaire de la honte...
Bien sûr, les sommes astronomiques parfois atteintes sont parfois dérangeantes, choquantes, à tout les coups interpellantes. Voilà bien une idée qui est dans l’air du temps, qui alimentent les discussions et qui est très politiquement correcte. Car oui, en France comme en Belgique, il est de bon ton pour les politiques de tirer à boulets rouges sur ces nouveaux riches, ces fortunes bien mal acquises. Notamment les ministres Jérome Cahuzac et Nadia Vallaud-Belkacem qui se plaignaient il y a quelques semaines du salaire « indécent et choquant » (€14 millions) de Zlatan Ibrahimovic au PSG. Voila la question que se pose l’opinion publique aujourd’hui : « Est-il normal de gagner 1, 3, ou 14 millions d’euros par an quand des milliers de personnes dorment dans la rue chaque nuit? » Voila l’air du temps, voila ce qui flotte dans nos rues, nos journaux, nos émissions de TV. Le salaire du Suédois est le salaire de la honte. Au final, voilà ce qu’on retrouve en concentré dans la question : » Ce transfert, c’est pour l’argent? » Plus qu’une question, c’est un reproche déguisé. Plus qu’un reproche, une accusation.
D’abord, on se trompe de coupable, si coupable il y a. Pour quelle raison le striker devrait faire une croix sur son gros tas d’ oseille? Witsel et consorts n’ont absolument aucune raison d’être gêné de gagner de l’argent dans l’exercice de leur métier. Bien entendu le salaire n’a aucune commune mesure avec la pénibilité du job, mais ils monnaient leur talent comme tout autre travailleur. Ceux qui devraient être dans la ligne de mire, c’est bien sur ceux qui allongent! Les demi-fous qui investissent des millions d’euros dans un club de foot dans le but de gagner des coupes et des championnats. Ce qui est malsain, ce n’est pas d’être payé €3 millions par an pour taper dans la balle, mais bien de payer ce salaire dément!
La couronne de lauriers…
Au lieu de se demander si Ibracadabra est vénal, on ferait bien mieux de demander à Nasser Al-Khelaïfi pourquoi il n’investit pas ses millions dans la construction d’orphelinats! Avec ces millions d’euros, on peut en faire des choses! Ce sont ces milliardaires qui alimentent la bulle spéculative du football moderne, et ce sont eux les coupables du malaise dans les discussions du Café des sports. Si l’argent leur offre déjà pouvoir, villas luxueuses et belles carrosseries, il leur manque bien souvent le prestige. Et ces entasseurs de billets vont le chercher dans le sport, et dans « le plus mieux de tous » : le football. Avoir son nom associé dans la même phrase, de l’autre côté du verbe, à David Beckham ou Kaka, est un puissant dopant pour les égos avides de reconnaissance de ces nouveaux riches.
Et ça marche. Pour preuve, en 2000, seuls les abonnés à Forbes connaissaient l’oligarque russe, alors qu’aujourd’hui l’influence et la renommée de Roman Abramovitch sont mondiales. En 2008, seul Bruno Metsu connaissait le tennisman qatari. Aujourd’hui de Boulogne à Auteuil, tout Paris remercie Al-Khelaïfi à genoux. Quand Abramovitch met €40 millions pour Hazard, ce n’est pas un footballeur qu’il s’offre, ce n’est pas la plus grosse promesse du foot européen qu’il se paie, c’est un servant pour porter sa couronne de lauriers.
trackback uri
4 commentaires
Je voulais justement faire un truc sur la grève des Denisov et Kerzhakov depuis les arrivées de Witsel et Hulk au Zenit. Mais bon, pas le temps… Et tant mieux, parce que tu l’as très bien tourné.
Le discours bien pensant de la gauche est soit d’une naïveté déconcertante, soit d’une malhonnêteté sans limite. Mais bon, les discours électoralistes de ces Parisiens élevés aux bonnes manières me débectent depuis bien longtemps.
Biensûr qu’ils seraient bien cons de dire non à ces contrats, les footballeurs. Moi le premier, je ne refuserait pas un gros contrat pour aller jouer (et vivre surtout!) à Londres, St-Pét’ ou Paris. Qui le ferait, franchement? Les exceptions doivent se compter sur les doigts d’une main, comme ce joueur du FC Séville qui a abandonné le foot il y a quelques mois maintenant après s’être senti coupable d’évoluer dans un milieu drainant tant d’argent. Mais c’est ça qui compte: si un club est prêt à payer autant un joueur, c’est que ce joueur lui rapporte beaucoup plus! Si le Real se paie un CR7 à 100 millions, c’est que les seules ventes de maillots amortissent le coût.
« Pour preuve, en 2000, seuls les abonnés à Forbes connaissaient l’oligarque russe, alors qu’aujourd’hui l’influence et la renommée de Roman Abramovitch sont mondiales. En 2008, seul Bruno Metsu connaissait le tennisman qatari. Aujourd’hui de Boulogne à Auteuil, tout Paris remercie Al-Khelaïfi à genoux. »
Les exemples sont si nombreux… Qui connaissait l’Anzhi Makhachkala avant l’arrivée de Roberto Carlos? Le Budnyodkor Tashkent avant celle de Rivaldo? Les championnats indiens et chinois? Tout cet argent sert à s’acheter une légitimité et des colonnes dans les médias. Le résultat n’est pas toujours à la hauteur certes, mais le plus souvent, ça marche.
Décidément c’est un journée fric sur PF…
Je ne peux que plussoir PJ moultes fois. Et quitte à payer très cher un mec comme Zlatan pour qu’il vienne, ça sert à montrer comment un vrai pro doit se comporter dans un club aussi, à des mecs qui se la coulent douce et gagnent un salaire pour … rien en fait.
Exemple d’une interview d’Hoarau :
» « s’investir autant aux entrainements, avoir toujours envie de gagner, je ne connaissais pas et ça m’a surpris. On se dit maintenant, il faut bosser. »
Même s’il avait le niveau d’Ibrahimovic, avec ce genre de comportement, le PSG ne serait jamais allé très loin avec des joueurs comme ça (et eux aussi très très bien payés vu leurs performances.)
Pourquoi personne ne parle de cas comme Chamack par exemple ? Le mec touche un salaire énorme à Arsenal, il joue l’équivalent de 2 matchs par saison, et glandouille à Londres, tout le monde sait qu’il a lâché l’affaire, et que son agent s’est fait plaisir. Ca me choque davantage je crois.
Chamack c’est un beau gâchis, dans un sens.
Hulk et Witsel au Zenith ça l’est aussi, mais dans un autre.
Les coéquipiers russes qui refusent de leur adresser la parole, c’est complètement ridicule. Le vestiaire a pété un plomb pour un question de pognon. Ce qui expliquerait la déculottée prise à Malaga.
Et pour l’international marocain, c’est l’exemple type du joueur de ligue 1 sur-évalué par les médias.