Une époque révolue: les binationaux

Jouer en Coupe du Monde pour deux pays différents, voilà bien une chose impensable dans le football actuel. Les médias se sont ainsi longtemps intéressés au choix de Diego Costa, qui a décidé de disputer avec l’Espagne la Coupe du Monde disputée dans son pays natal. S’il était né quelques décennies plus tôt, le futur ex-attaquant de l’Atlético aurait eu un choix peut-être un peu moins cornélien à faire. Car avant lui, cinq joueurs ont eu l’opportunité de représenter deux pays différents dans la compétition. Cinq joueurs pour cinq histoires particulières.

Monti Italie - Image xtratime.orgLe premier d’entre eux est Luis Monti. Un cas exceptionnel, puisque en plus de disputer deux Coupes du Monde avec deux pays différents, Monti a réussi le tour de force d’arriver à chaque fois en finale! Monti est présent lors de la première édition, en 1930, avec l’équipe d’Argentine, dont il devient le premier buteur dans la compétition lors de la victoire 1-0 contre la France. Alors joueur de San Lorenzo, Monti part jouer à la Juventus en 1931. Il est en effet un «Oriundo» , un descendant d’émigrés italiens. Considéré comme l’un des meilleurs milieux défensifs de l’époque malgré un jeu très rugueux, Monti remporte quatres titres de champions avec l’équipe turinoise (1932, 33, 34 et 35). Vittorio Pozzo, le sélectionneur italien, voit alors en lui le lien parfait entre la ligne défensive tenue par Monziglio et son attaquant Meazza. A l’instar de ses compatriotes Raimundo Orsi et Enrique Guaita, Monti se voit accepter la double nationalité. Et c’est ainsi qu’il dispute le Mondial 1934 sous le maillot italien. Avec succès. Particulièrement rugueux, Monti blesse deux adversaires lors du quart de finale contre l’Espagne, puis la star autrichienne Matthias Sindelar en demi-finale. En finale, l’Italie l’emporte 2-1 contre la Tchécoslovaquie. Seul joueur à avoir disputé deux finales avec deux nations différentes, Monti aura remporté celle disputée à domicile, en Italie. Resté dans son pays d’adoption pour sa carrière d’entraîneur, Luis Monti ne rentrera en Argentine avant de s’éteindre en 1983, à l’âge de 82 ans.

Si le nom de Luis Monti n’est pas resté célèbre, ce n’est pas le cas du deuxième des cinq joueurs binationaux, puisqu’il s’agit du grand Ferenc Puskas. Médaillé d’or olympique en 1952 puis finaliste de la Coupe du Monde 1954 avec la légendaire équipe de Hongrie, Puskas, en tournée avec le Honved lors des événements de novembre 1956, choisi de rester à l’Ouest et se voit banni par le pouvoir communiste hongrois. Suspendu par la FIFA à la demande de la fédération hongroise, Puskas traverse deux années d’errance avant qu’Emil Osterreicher, ancien entraîneur du Honved devenu directeur technique du Real Madrid, ne pense à lui. Puskas rejoint en 1958 Di Stefano, Gento et Kopa au sein du grand Real, avec le succès que l’on sait. Naturalisé espagnol dès 1961, il ne connaîtra pas la même réussite avec la sélection espagnole. Il ne compte que quatre sélections avec elle, dont trois lors de la Coupe du Monde chilienne de 1962. Binational lui aussi, son compère Di Stefano n’en dispute aucune, ni avec l’Argentine ni avec l’Espagne.

Puskas cze-esp - Photo soccermond.com

Puskas sous le maillot espagnol lors de la défaite 0-1 face à la Tchécolslovaquie lors de la Coupe du Monde chilienne en 1962.

jose alfatini - Image forpal.blogspot.comCette même édition chilienne voit deux autres joueurs évoluer pour leur seconde patrie. Né au Brésil de parents italiens, José Altafini évolue tout d’abord avec la sélection brésilienne au Mondial suédois de 1958. Victime de la rude concurrence du jeune Pelé, Altafini n’est pas titulaire en demi-finale ni en finale. Il marque néanmoins deux buts en trois titularisations durant la compétition, et est couronné champion du monde. La même année, Altafini quitte Palmeiras et le Brésil pour l’Italie et le Milan AC, club avec lequel il remporte la Coupe d’Europe des Clubs champions en 1963, en marquant les deux buts de son équipe en finale, remportée 2-1 contre Benfica. Un an plus tôt, Altafini, surnommé Mazzola en raison de sa grande ressemblance avec l’attaquant du Grande Torino, est présent au Chili avec la Squadra Azzurra. Il y joue deux des trois matchs de l’équipe d’Italie, éliminée au premier tour. Après Milan, Altafini joue à Naples puis à la Juventus, avant de finir sa carrière en Suisse, au FC Chiasso. Avec 216 buts marqués en 459 matchs de Série A, José Altafini est aujourd’hui le troisième meilleur buteur du championnat italien, à égalité avec Giuseppe Meazza.

Santamaria - Image todocoleccion.netJose Santamaria est le dernier joueur présent en 1962 avec un nouveau maillot. Défenseur du Nacional de Montevideo, Santamaria est appelé en équipe nationale uruguayenne pour la Coupe du Monde 1950. Las, son club refuse de le libérer, sous prétexte qu’il n’était pas appelé pour jouer à son poste. José Santamaria ne fait ainsi pas partie de l’équipe d’Uruguay championne du monde pour la deuxième fois. Quatre ans plus tard, il est bien présent en Suisse avec son équipe nationale. Après une défaite contre la Hongrie en demi-finale, la Celeste termine à la quatrième place de la compétition. Un parcours qui attire l’œil du Real Madrid. Santamaria rejoint le club madrilène en 1957. Le Real est alors au sommet du football européen. Santamaria remporte avec lui cinq championnats et trois Coupes d’Europe des clubs champions. Son arrivée en Espagne coïncide également avec ses premières apparitions avec l’équipe nationale, après 20 sélections sous le maillot uruguayen. Et c’est avec l’équipe espagnole qu’il participe au Mondial 1962. Avec peu de réussite, puisqu’il ne dispute que deux matchs des trois joués par l’Espagne, qui est éliminée au premier tour. Vingt ans plus tard, Santamaria sera présent à la Coupe du monde 1982 en tant que manager de l’équipe nationale espagnole, hôte du tournoi.

L’histoire du dernier de ces cinq joueurs est plus particulière puisqu’il n’est point question d’émigration. Titulaire avec la Yougoslavie en quarts de finale du Mondiale italien en 1990, Robert Prosinecki a vu son pays disparaître avant de revenir en Coupe du Monde en 1998 et en 2002 sous le maillot de la Croatie. Avec une certain réussite d’ailleurs, puisque les Croates étaient parvenus jusqu’à cette fameuse demi-finale en 98 pour leur toute première apparition dans la compétition. Les Allemands se souviennent encore de leur élimination en quarts de finale sur un surprenant et lourd score de 3-0. L’Allemagne, un autre pays pour lequel Prosinecki aurait pu jouer, étant natif de Schwenningen, près de la frontière alsacienne.

Prosinecki, auteur notamment de deux des plus beaux but de la Coupe du Monde 1998.

 
Histoire

trackback uri 3 commentaires

Sympa ce petit billet PJ !

Il parait que la copine de Samir Nasri le verrai bien en 6e joueur binational, peu importe le pays d’accueil en fait…

par Vince, 26.05.2014 à 17h04   | Citer

Faudrait déjà qu’il en joue une avec l’équipe de France, et c’est pas gagné!

par PJ, 26.05.2014 à 18h30   | Citer

Merci PJ, j’ai lu ça ce matin.
L’es content Stef, l’aime bien l’histoire du foot, Stef. :)

par stef, 27.05.2014 à 06h23   | Citer