le 3 juin 2014 à 17:43Quand les Ecossais se voyaient champions du monde

Avant une Coupe du monde, certaines équipes abordent la compétition avec confiance. Parfois un peu trop. Un flegme bien britannique, voilà qui a manqué à certains dirigeants écossais un beau jour de 1978. Cette année-là, l’Ecosse est qualifiée pour le Mundial argentin. Mieux, l’Angleterre, battue à la différence de buts par l’Italie, est absente de la compétition. Ce qui fait de l’Ecosse la seule et unique équipe britannique présente. Il n’en fallait pas plus pour que Kenny Dalglish et ses coéquipiers soient vus par tous comme les futurs vainqueurs.

L’euphorie qui entoure la sélection écossaise est grandissante avant le départ des joueurs pour l’Argentine. Forts de deux titres de vainqueurs du «Home Championship» en 1976 et 1977, les Ecossais sont en pleine confiance. Le sélectionneur MacLeod affirme ainsi que son équipe obtiendra au moins une médaille. Son enthousiasme est contagieux. Peu à peu, c’est tout un pays qui se laisse griser, jusqu’aux plus hauts officiels des institutions d’état. Avant de partir pour l’Argentine, l’équipe parade dans un Hampden Park plein à craquer, et lorsque les joueurs prennent le chemin de l’aéroport de Prestwick pour s’envoler vers l’Amérique du Sud, c’est sous les vivas d’une foule certaine de la victoire des siens et riant déjà de la surprise qu’elle prépare aux grandes nations.

La Royal Mail elle-même succombe à l’enthousiasme général. Elle décide alors d’anticiper l’événement en démarrant l’émission d’un timbre d’une valeur de 9 pence : « Ecosse – Championne du Monde 1978. » Le timbre est imprimé et distribué dans tous les bureaux de poste du pays avant le début de la compétition !

Il ne reste alors plus qu’une chose – une bagatelle – remporter cette Coupe du Monde. Mais tout ne se déroule pas comme prévu. Versés dans le groupe 4 en compagnie de l’Iran, du Pérou et des Pays-Bas, les Ecossais déchantent rapidement. Leurs deux premiers matchs sont sensés n’être qu’une formalité. Et pourtant, Graeme Souness, Kenny Dalglish, Joe Jordan et leurs coéquipiers vont vite déchanter. Face au Pérou, les Ecossais font un match désastreux et s’inclinent 1-3, encaissant notamment ce somptueux coup-franc de Cubillas, qui reste parmi les plus beaux de l’histoire du football.

Face à l’Iran, présent pour la première fois en Coupe du Monde, la prestation n’est guère meilleure et les Iraniens arrachent un match nul 1-1. Pour se qualifier, les joueurs de McLeod n’ont plus le choix, il faut battre les Pays-Bas par trois buts d’écart. Ce qui devait être un match au sommet face aux vice-champions du monde en titre devient un match couperet. Transparente jusque-là, l’équipe écossaise redevient lors de ce match l’équipe flamboyante qu’elle a su être les deux années précédentes. Et Archie Gemmill marque un but fabuleux.

Nous sommes à la 68e minute du match, et cet exploit donne un avantage de deux buts à l’Ecosse. Tout un pays y croit plus que jamais! Las, Johnny Rep marque quelques minutes plus tard. Tout est fini. L’Ecosse s’offre une victoire de prestige 3-2, mais est éliminée à la différence de buts par le futur finaliste.

Face à cette humiliante élimination, Ally McLeod s’accroche à son poste de sélectionneur, mais il ne dirigera son équipe qu’une fois supplémentaire avant de démissionner. Quant à la Royal Mail, c’est dans l’urgence qu’elle doit agir et retirer dans la discrétion la plus totale ses timbres « Ecosse – Championne du Monde 1978. »